Hier soir, à l'Apollo, seul, absolument seul, pour voir le film de Bouli Lanners, Les Géants. Singulière sensation de ce cinéma juste pour soi, cette vaste salle dont j'occupai à peu près le centre géométrique. Le projectionniste invisible, que je rencontrai à la sortie, me dit n'avoir pas vu le film. Qu'avait-il fait après avoir lancé les bobines ? Fumé sa clope dans la courette de l'entrée ? Lu ses mails dans le bureau ? Discuté le coup avec E. qui tenait la caisse ? Ces images n'avaient donc été que pour moi. Le film était-il si austère et si ennuyeux pour que le castelroussin s'en détourne aussi radicalement ? Non, pourtant. Je crois plutôt qu'il n'a bénéficié d'aucune promotion, que ce n'est pas une comédie, et pas non plus un film intello, que c'est un film belge mais que Poelvoorde ne joue pas dedans, que c'est l'histoire de trois ados en rupture de famille, trois garnements lâchés dans un monde de brutes, et que les adultes se foutent des histoires d'ado et que les ados ne foutent les pieds à l'Apollo que traînés par leurs profs. C'est en tout cas trois jeunes acteurs étonnants de justesse et de fraîcheur, trois incarnations wallonnes d'Huckleberry Finn. C'est une sorte de conte, cruel et sanglant comme les vrais contes, salubre et joyeux comme les vrais contes.
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