dimanche 1 juin 2014

Laisse de Loire

Il sera donc beaucoup pardonné à Danièle Sallenave (DS), car c'est carrément une entrée qu'elle accorde à l'alluvion dans son Dictionnaire amoureux de la Loire (DAL).

"L'histoire de la Loire tient dans cette énumération, qui en est presque le portrait ou la photographie : ensablement des fonds, réduction de la profondeur, enrichissement des rives par le dépôt de sédiments chargés d'éléments nutritifs.
Éminemment fertiles, les alluvions , constitutives du cours de la Loire, le sont donc de son histoire, et du destin des hommes qui habitent ses bords. Ce sont elles (le mot est féminin, on l'oublie souvent, moi la première) qui ont donné naissance aux riches vallées maraîchères  qui bordent le cours de la Loire au pied des collines de tuffeau à châteaux et à vins."
Sont-elles aussi fertiles les alluvions de nos vies ? Savons-nous encore prendre le temps de cultiver le sol de notre expérience ? Pouvons-nous encore employer ce mot même d'expérience ? Ou bien n'y a-t-il plus qu'un flux d'impressions, de sensations, de savoirs rapidement obsolètes, de rencontres fugaces, vites oubliées, vite remplacées, comme ces statuts sur les murs Facebook qui s'entassent, s'accumulent et vite disparaissent, car on n'y revient pas, ou si peu ? Eric Chevillard a-t-il bien résumé, avec son humour habituel, notre situation dans l'aphorisme suivant ?

Nous vivons plus longtemps que nos aïeux mais avec une moindre conscience de la durée. De petites distractions et compulsions innombrables la pulvérisent – il n’y a plus de longueur de temps. Nous mourrons centenaires sans avoir eu jamais dix minutes devant nous.
Si ce site a un sens, c'est peut-être bien de revenir sur ce qui fût, sur ce qui s'est déposé, en moi, en nous.

Tout comme il existe la laisse de mer, cette frange littorale où la marée haute charrie son butin d'algues et de bois flottés, il existe la laisse de Loire, provoquée justement par l'alluvionnement des berges. Les amis nous en firent découvrir une à Montlouis-sur-Loire, un jour d'hiver 2010. Revoyant les vidéos que je fis ce jour-là sur ce site étonnant, avec les enfants, quatre ans plus jeunes donc, je suis saisi par l'émotion.







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