J'avais annoncé un quatrième chapitre du roman du hasard, mais je digresse, je procrastine, je dois rendre compte encore de quelques enchantements poétiques. J'appelle "enchantements" ces collisions de mots, ces résonances aux vibrations longues qui viennent mettre de l'ordre et du sens dans nos existences si prosaïques. Ceci me fait penser à cette vidéo partagée récemment par l'ami Tomahawk Piper (navajo cluisien) :
Etienne Cornevin, dans Paçages, (in Torticolis 3), notait que ce mot anglais de random (hasard) venait sans doute de l'ancien français randon (mouvement brusque, impétueux), "qui a signifié primitivement "course impétueuse" et appartenait au langage de la vènerie où il a fini par avoir le sens précis de "circuit que fait à l'entour du même lieu une bête qu'on a lancée". "Courir de randon" ou "courir à randon" signifiait courir jusqu' à l'extrême, jusqu'au bout de ses forces : l'expression a donné le verbe de l'ancien français "randir" (courir avec impétuosité) d'où est venu "randonner" et, de ce dernier "randonnée", "randonneur"(...)"
A la place des grains de couscous, je pense qu'on aurait pu prendre du sable. Le sable c'est la matière des peintures indiennes sacrées, et ce qui vint sous la plume de Georges Perros, on l'a vu récemment, mais je l'ai retrouvé aussi chez un autre grand poète, comme Perros noteur invétéré, mais encore vivant, lui : Antoine Emaz, dont je viens tout juste d'achever la lecture du dernier volume de notes, Planche (Rehauts, 2016).
Et voici la note en question :
Tout est calme sous le ciel vaste bleu. Je sais qu'il faudrait avancer dans la besogne, mais je n'en ai pas envie. Et je ne peux pas écrire sans impulsion interne : nécessité urgente ou vague désir, peu importe, mais il faut une intensité de pression minimale. Sinon, non. Regarder le jardin suffit, présentement. Et je sais que ce n'est pas paresse mais incapacité. Inutile de m'obliger, je ne ferai rien de bon.
Il faudrait descendre plus bas dans le calme, au fond, pour trouver encore des mots dans le sable silencieux de ce début d'après-midi d'été. Et non. On va rester dans le plat calme bleu et l'immobilité des arbres.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire