dimanche 12 mai 2013

Coeurs sur la main

J'avais fini le dernier billet sur la dame de cœur et les cartes à jouer où Jean-Jacques Rousseau écrivait ses Rêveries du promeneur solitaire, comme ce huit de cœur conservé au Musée de Neuchâtel. Et une synchronie de cœurs récemment notée m'était alors revenue en mémoire.
Le 27 avril, j'avais reçu un message d'une collègue, une amie partie exercer à Helsinki, message qui n'avait rien d'intime, puisque je n'en étais que l'un des 74 destinataires. Comme bien souvent, cette amie, B., y narrait avec humour les tribulations que la malchance et une belle tête de linotte la faisaient traverser avec une admirable régularité. Ainsi, lors d'un séminaire à Prague, elle s'était fait subtiliser son portefeuille dans un tram. Heureusement, "Mes collègues, écrit-elle, eurent le cœur sur la main. Une enveloppe a circulé à mon insu et j'ai pu ainsi payer mon passeport provisoire, mes repas et mon taxi pour aller à l'aéroport. Car j'étais vraiment démunie." En fait, c'était inscrit ainsi :
B. raffole des smileys, dont elle truffe chacun de ses courriels. Dans celui-ci, l'émoticône (parlons français) cœur se retrouva employé à moult reprises. Par exemple :

B. ne se vante pas, je la connais, elle est d'une vraie générosité. Je lui répondis d'ailleurs un petit mot où je lui disais en passant que nous avions dormi tout récemment en terre basque, à Bayonne, où vivent maintenant ses grands enfants et où elle rêve de pouvoir enfin s'installer un de ces jours.

Bon, là-dessus, je me rends à la médiathèque, où j'étais un peu en retard pour mes retours d'emprunt. Je régularise et ressors avec quelques livres (dont j'aurai à reparler) et une bande dessinée de Marie-José Jaubert et Chantal Montellier, L'insoumise. Dont je commence la lecture dès mon retour à la maison.
"Portrait de Christine Brisset, militante exceptionnelle qui devient la "passionaria des pauvres", en prenant la tête d’une petite armée de volontaires (étudiants, ouvriers et femmes du monde...) qu’elle transforme en squatters. Elle fonde l’association des "Castors angevins" puis se fait conductrice de logements sociaux, d’écoles, de centres commerciaux, d’un cinéma et même d’une église. Cette héroïne des "Actualités françaises" est poursuivie et condamnée quarante-neuf fois par le tribunal correctionnel." Source.
Bien avant l'abbé Pierre, cette femme de caractère avait lutté contre la misère et l'indignité des conditions de vie des plus pauvres. Le traitement graphique de Chantal Montellier est remarquable : la silhouette de Christine Brisset, bien campée sur ses deux jambes, illustre sa ténacité en la désignant aussi comme femme à abattre et femme de cœur.



 C'est ce petit cœur qui me rappelait opportunément le courriel de B., d'autant plus que - détail biographique important - Christine Brisset, travaillant en 1940 à Hossegor dans un centre d'accueil d'enfants de la banlieue ouvrière de Paris, se retrouve hospitalisée d'urgence en mai à Bayonne, pour y subir une importante opération, un problème d'ulcères à l'estomac dont elle aura à souffrir toute sa vie.

Je retrouve aujourd'hui une double page où elle est littéralement figurée en dame de cœur par Chantal Montellier :


Il me faut maintenant évoquer une autre dame de cœur.

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