« La verticale sépare la mer,
le ciel tantôt l’ombre, tantôt l’air.
Je peins entre les choses. »
Geneviève Asse
Je lis toujours avec beaucoup d'intérêt Suédois d'ailleurs, le blog de Nils Blanchard, grand connaisseur de l’œuvre d'André Dhôtel et de la culture scandinave. Deux domaines que je connais bien mal (et d'ailleurs, je n'ai jamais voyagé dans ces pays du nord de l'Europe qui pourtant ne manquent pas de me fasciner), aussi n'ai-je pas eu l'occasion jusqu'ici de lui faire écho. Mais une petite note terminale au dernier billet, Songeries finlandaises, va me le permettre.
Dès que Paris est libéré, elle s’inscrit à la Croix Rouge pour devenir conductrice-ambulancière dans l’armée française. Pendant deux ans, elle ne peindra pas. Fin 1944, elle est intégrée à la 1ere DB de l’armée d’Afrique, et participe à la campagne d’Alsace et d’Allemagne, puis part en Tchécoslovaquie. Elle est sans doute la seule artiste au milieu de femmes issues de tous les milieux, aux origines géographiques très différentes comme le Maroc, l’Algérie et Madagascar. Geneviève Asse a déjà une sorte de lien profond avec la guerre et l’idée qu’il faut se battre ne lui est pas étrangère, car son jeune oncle, Robert, qui vivait aussi au Bonnervo lorsqu’elle y était enfant, avait combattu durant la première Guerre Mondiale, dont il était revenu complètement traumatisé. La liberté étant le socle de l’éducation et sans doute de la personnalité de Geneviève Asse, il est naturel qu’elle veuille la défendre : « J’avais en moi une révolte contre le racisme, l’injustice, la défaite de 40. Je fus heureuse d’être admise dans l’armée de l’amalgame, où les soldats étaient arabes, noirs, hommes de toutes les couleurs et de toutes les couches sociales. »
Elle ira jusqu’au camp de Terezin où elle apprend par un jeune Tchèque la mort récente de Robert Desnos, Desnos qu'elle a connu à Paris, ils buvaient ensemble des cafés au Flore, à Saint-Germain-des-Prés : « Le jeune Tchèque me mena jusqu’au baraquement et me fit entrer dans la baraque de Desnos. Les murs étaient noirâtres et il y avait une paillasse retournée. L’image de cette baraque m’a suivie longtemps et me suivra toujours. »
Je ne développe pas plus, il faut lire l'article, je veux juste relever un passage qui résonnait parfaitement avec le motif de la fenêtre qui avait fait l'objet de mon article :
Peu à peu, au fil des années 1970, les autres couleurs disparaissent. À partir de 1980, il n’y a plus que le bleu. Mais encore une fois, les toiles de Geneviève Asse ne sont jamais ni monochromes, ni uniformes. Ce sont des univers en soi, des fenêtres ouvertes sur l’espace, sur l’infini, des horizons qui prennent toute leur profondeur grâce à une trace minuscule laissée par une autre couleur, comme le rouge par exemple, qui vient allumer le feu du bleu, le faire résonner, le fendre comme une peau, et lui donner une profondeur insoupçonnée.
L’idée de la fenêtre ou de la porte, déjà présente dans les années 1940, est toujours là, mais il s’agit de fenêtres et de portes symboliques désormais, qui ouvrent non plus sur une réalité tangible, mais sur des univers immenses et impalpables, qu’on pourrait même qualifier de spirituels. [C'est moi qui souligne]
En 1950, par exemple, la fenêtre était au cœur d'une composition où les objets (torchon avec liseré rouge, verres, bouteille, théière) prenaient encore place dans leur humble simplicité.
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Composition à la fenêtre, vers 1950, Peinture, Huile sur toile, 162 x 114 cm |
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