mercredi 19 juillet 2017

# 171/313 - Entre bruissements et cataclysmes

"Aujourd'hui, lorsque j'écoute clarines et sonnailles, je me sens indépendant du troupeau, à l'opposé des clochettes et cloches de mon enfance.
Bovins et ovins accordent à ces accessoires tintinnabulants une importance distraite, ils sonnent sans le savoir par leur propre déplacement, ils rassurent ainsi leur gardien et semblent paître hors du temps, dans un espace infini. Je les envie... Cette suite d'images divague autour de sons, simples et complexes, ceux qui sont émis par la cloche de bronze, ordinaire que Léonard de Vinci évoque soigneusement dans son journal."

Daniel Nadaud, Sur le fil, p. 88-89

Alors que j'enregistrais le retour des cloches dans ces pages, il se trouve que j'étais invité dimanche 9 juillet à Gargilesse pour une rencontre musicale entre le contrebassiste Michel Thouseau et le percussionniste Joël Grare. Sur l'autoroute, l'orage éclata avec violence, il pleuvait à seaux et je crus bien ne jamais pouvoir arriver à temps. Heureusement, à Argenton, Jupiter avait déjà cessé son raffut et Gargilesse ne s'alarmait que de quelques gouttes. Je me garai en bas près du pont et montai à l'église romane Notre-Dame de Gargilesse où avait lieu le concert.

C'est Joël Grare qui ouvrit le bal, et devinez avec quoi, avec des cloches bien sûr. Je n'ai rien enregistré du moment, ni même pris une photo, et je n'ai trouvé aucune trace ailleurs : ces très beaux instants musicaux resteront seulement dans les mémoires, ce qui n'est pas plus mal.Toutefois, sur le site de Joël Grare, existent quelques vidéos avec le même ensemble de cloches. Comme celle-ci :



L'église elle-même ne fut pas en reste et à dix-neuf heures elle participa activement, y frappant les sept coups de l'heure puis enchaînant par des volées de belle facture. Ceci sans troubler les musiciens qui intégrèrent sans frémir  leur puissant acolyte dans leur improvisation. Comme l'écrit joliment Joël Grare sur son site, "ici, on se raconte  “entre les notes”, un peu comme dans un monde parallèle, entre bruissements et cataclysmes. Toutes les matières seront conviées, de lʼétat brut au raffinement extrême, des plus pauvres aux plus nobles. Le percussionniste se doit  dʼêtre un alchimiste, dʼhonorer la main au travail, chère à Bachelard,  celle qui transformera la matière en sons sous vos yeux." Allié à la contrebasse chimérique, archéo-futuriste de Michel Thouseau, à ses flûtes aussi de charmeur de serpents, il m'immergeait dans une atmosphère méditative que troublait seul le couple juste derrière moi, aimant à commenter parfois mais incapable de descendre au chuchotement - il y avait là quelque chose  de bouffon, qui empêchait de s'offusquer en préservant de l'esprit de sérieux. D'ailleurs c'est sur un morceau humoristique, où Joël Grare, loin des percussions exotiques, faisait couiner en rythme des cochons de plastique, que s'acheva cette rencontre.

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