vendredi 22 décembre 2017

# 305/313 - Un soleil entre des planètes mortes

17/12 - Ce samedi matin, à la médiathèque Equinoxe, inauguration de l'exposition consacrée à Étienne Cornevin, disparu en mai 2016. Le directeur d'un centre culturel slovaque à Paris, j'ignore son nom, prend la parole pour rappeler le passage d’Étienne à Bratislava, jeune professeur introduisant alors Cavanna, Reiser et Lautréamont auprès de ces lycéens dont il faisait partie, au coeur de ce pays encore largement bâillonné par le système communiste : une bulle de liberté qui restera inoubliable. Revenu en France, Etienne ne cessera d'être l'ambassadeur des artistes slovaques. Le lendemain de sa mort, il devait participer à Bordeaux à l'inauguration de l'exposition des collages d'Albert Marenčin, poète surréaliste à qui il avait consacré deux articles dont Albert Marenčin, L’invention du pata-surréalisme, in Ateliers de curiosité (en ex-Tchécoslovaquie), Revue Ligeia, dossiers sur l’art, no 125-128, juillet–décembre 2013, p. 17-56.

L'après-midi, je repasse à la médiathèque (lors de l'inauguration, j'ai surtout discuté et n'ai pratiquement rien vu de l'expo, mieux vaut y aller en solitaire). Je ne peux m'empêcher ensuite de jeter un coup d’œil sur les rayonnages, y repère le dernier opus d'un écrivain que j'apprécie, Stéphane Audeguy, Une mère, "élégie", écrit-il. Le livre est court, je prends.
Sur une étagère réservé aux ouvrages non récents mais recommandés par les bibliothécaires, je trouve ma Méduse du jour :

Je ne suis pas certain de la lire, mais je prends quand même.
Et puis, pour faire bonne figure, je ne peux faire moins qu'arpenter le rayon BD. Un roman graphique me fait signe, belle couverture, titre poétique et intrigant. Et c'est traduit du suédois en plus (Linné n'est pas loin). Je prends donc Un soleil entre des planètes mortes, d'Anneli Furmark (Ça et Là, 2017).

Bon, ça ira, je ne me charge pas plus. A la maison, je commence par la BD, que l'éditeur présente ainsi : "Barbro, une suédoise d’une cinquantaine d’années mal dans sa peau, entame un voyage dans le nord de la Norvège pour rejoindre la ville de Tromsø, décor principal d’un classique de la littérature scandinave, Alberte et Jacob de Cora Sandel, qui l’obsède depuis de nombreuses années. Elle se rend à Tromsø comme en pèlerinage, pour se rapprocher du personnage principal du roman, Alberte, une jeune femme éprise de liberté prisonnière du carcan des mentalités provinciales rigides."

Cora Sandel est un pseudonyme. Son véritable nom est Sara Fabricius. Tiens, un nom qui ne peut nous laisser indifférent. A une lettre près, le c au lieu du t, c'est celui du peintre du Chardonneret de Donna Tartt : Carel Fabritius (d'ailleurs on peut s'amuser à anagrammatiser Cora Sandel en Carel Sando, et il n'est pas sans doute fortuit de lire Sand au principe de ce pseudonyme : Sara a passé quinze ans en France et elle traduira La vagabonde de Colette - mais mal accueillie par la critique, cette traduction sera sans lendemain).  Cora Sandel meurt à l'âge de 93 ans, le 3 avril 1974, à Uppsala (c'est aussi à Uppsala que Linné passa de vie à trépas).
L'album est imprimé sur les presses de Polygraf Print en Slovaquie.

Anneli Furmark a placé en guise de citation liminaire le début de la chanson des Smiths, Ask (1988).

Shyness is nice, and
Shyness can stop you
From doing all the things in life
You'd like to… 
 
La timidité c'est mignon, et
La timidité peut t'empêcher
De faire toutes les choses
Que tu aimerais dans la vie
 
Citation qui fait écho à la timidité de Barbro, la quinquagénaire de l'album, qui n'ose pas entrer en contact avec les autres, qui a toujours peur de gêner. 
 
Je n'ai acheté jadis qu'un seul album des Smiths, ce qui est amusant c'est que je l'ai ressorti très récemment d'un cagibi. Il avait souffert comme bien d'autres d'une infiltration d'eau dans un garage de La Châtre où j'avais entreposé un temps presque tous mes vinyls. Les disques étaient généralement intacts mais les pochettes avaient souvent morflé. Collées les unes aux autres, elles se déchiraient quand on voulait les séparer.
 
Je l'avais écouté plusieurs fois, ce qui ne m'était pas arrivé depuis des années. La voix de Morrissey, la guitare de Johnny Marr. Quelque chose fonctionnait, me touchait encore.

Et puis j'ai visionné Ask sur You Tube. Le morceau dure 3:13.

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