jeudi 25 janvier 2024

Cash

Cash. Johnny Cash. Le célèbre chanteur américain (1932 - 2003). Que je connais très mal. Il se trouve que je venais de terminer Ubac dans l'après-midi du 20 janvier, et que je vis sur le programme télé que le Columbo du jour, sur TMC, avait pour guest star Johnny Cash précisément. Je ne savais pas qu'il avait aussi des dons d'acteur. Columbo et Johnny Cash, il fallait que je vois ça. C'était l'épisode 7 de la saison 3, intitulé Swan Song, le chant du cygne, sorti en 1974. Johnny Cash y interprète Tommy Brown, un chanteur de country chrétien, adulé par les foules mais rudement cornaqué par sa femme (Ida Lupino), intraitable bigote qui n'hésite pas à exercer un chantage sur son sulfureux passé. Pour retrouver sa liberté, Brown, personnage des plus sympathiques au demeurant, va provoquer le crash  de son petit avion de tourisme, abandonnant sa femme empoisonnée par une thermos de café gavé de barbituriques,  sautant en parachute, le dissimulant dans un tronc d'arbre creux, avant de revenir sur les lieux du drame et faire croire au miracle de sa survie. On ne sera pas trop regardant sur la vraisemblance de la combine, that is not the question. Pour se faire une idée de la chose, voici un extrait :


Si j'étais si empressé de suivre cette histoire, c'est aussi que le nom de Johnny Cash m'était apparu très récemment. Et pas n'importe où, non, dans le corps de l'article que Philippe Lançon consacre à Peter Handke le 16 juin 2011, L'Europe errante, où je trouve la citation sur la prière, qui donne le titre de l'article du 17 janvier. Eh bien, dans ce même article, on peut lire ceci : "L'ex-écrivain sans nom demande à Lagunas s'il a bien rencontré Johnny Cash à Atlanta : «Il ne sait sans doute pas qui c'est, dit Handke. Moi, il y a longtemps, j'ai rencontré Johnny Cash dans un avion entre Philadelphie et Atlanta, mais, à l'époque, il n'était pas important pour moi. A bord, il y avait aussi Mohammed Ali. J'ai eu l'indélicatesse de le prendre en photo Polaroid sans en faire une de Cash, qui était deux rangs derrière.» Pendant qu'il écrivait la Nuit Morave, il écoutait les derniers disques de Johnny Cash et de Leonard Cohen."

La place de l'avion, qui ne m'avait pas frappé sur l'instant, me semble maintenant étonnante. Bon, encore une fois, si je n'avais été en présence que de ces deux éléments, la série et le souvenir de l'article de Lançon, je ne serais pas allé plus loin. Mais il y avait un troisième élément. Et donc une nouvelle application de ce que j'ai nommé la règle de trois. Ce troisième élément est une bande dessinée que l'on m'a offerte à la fin de l'année dernière, et que je n'avais pas encore lue : Johnny Cash, I see a darkness (Casterman, 2018), par le dessinateur allemand Reinhard Kleist. Après avoir visionné l'épisode columbesque, j'ai entamé ce roman graphique (qui était dans un format de poche, avec des caractères si petits que j'ai dû me taper toute l'affaire avec une loupe).


A la fin de Swan Song, Columbo démasque Tommy Brown/ Johnny Cash, mais l'on sent bien que pour une fois il a de la sympathie pour le meurtrier qu'il vient de confondre. Ils sont tous les deux en bagnole, et écoutent une chanson de Brown. Et Columbo conclut alors :"Un homme qui chante comme ça ne peut pas être mauvais."


Or, dans la bande dessinée, en contrepoint de la vie de Cash, Kleist s'attarde sur un détenu de la terrible prison de Folsom, Glen Sherley, auteur-compositeur lui-même, qui enverra à Cash sa chanson Greystone Chapel, qu'il tiendra à interpréter lors de son fameux concert dans ce même pénitencier de Folsom en 1968.  "La partition, peut-on lire dans Wikipedia, lui avait été donnée la veille seulement par le pasteur de la prison. Cash prendra ensuite fait et cause pour Sherley, parvenant à faire démarrer sa carrière de chanteur et même à le faire libérer de prison. Mais Sherley supportera mal la liberté et la vie de musicien célèbre, retombera dans l'anonymat dans les années 1970 avant de se suicider en 1978. Cet échec n'empêchera pas Cash de continuer à s'engager politiquement pour améliorer le sort des prisonniers aux États-Unis." Kleist a-t-il vu Swan Song ? je ne sais, mais toujours est-il que lorsque Cash rencontre Sherley, ses mots sont proches de ceux de Columbo :


Autre hypothèse : ces mots sont vraiment ceux de Cash lors de son entrevue avec Sherley, et le scénariste de Columbo a trouvé malin de les attribuer à Peter Falk s'adressant à Brown/Cash.


Dernière remarque : dans l'article sur la prière, j'ai inséré la vidéo d'un extrait des Ailes de désir, de Wim Wenders, qui contient ce superbe poème écrit par Handke, Quand l'enfant était enfant. Or, on y voit à un moment Peter Falk dessinant, Peter Falk, ex-ange qui a choisi de redevenir humain. Et, au début du film, c'est dans l'avion qui l’emporte vers Berlin que nous le voyons penser, écrit Hervé Aubert, à « Emil Jannings, Kennedy et von Stauffenberg » (le premier était un acteur ayant tourné dans certains films classiques du cinéma allemand des années 20 ; le président Kennedy avait fait son fameux discours « Ich bin ein Berliner » à Berlin le 26 juin 1963 ; et Carl von Stauffenberg était l’officier allemand qui a cherché à assassiner Hitler lors de l’opération Walkyrie). L'avion, toujours l'avion.


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