mercredi 23 juillet 2025

Adorations tourangelles

Rien publié depuis le 11 juillet. C'est que j'ai été appelé à Tours, pour garder les deux chats de mon fils Gabriel, qu'il ne pouvait emmener avec lui en vacances. Catkeeper, je me suis donc exilé une semaine. Je n'écris guère en dehors de chez moi, et je n'ai pas fait exception à la règle. Ce fut un séjour par ailleurs bien agréable, les deux matous sont adorables et j'en ai profité pour flâner dans la ville et visiter quelques expositions. Ainsi suis-je retourné au Musée des Beaux-Arts de Tours, que j'avais découvert il y a plus de dix ans, au temps où Pauline faisait ses études dans cette ville. Le seul véritable souvenir précis que j'en avais gardé était  Mantegna dont les tableaux m'avaient marqués par leur puissance et la précision de leurs architectures. En particulier, La Prière au jardin des oliviers (1457-1459), que j'ai donc retrouvée avec plaisir.



Mais ce qui me frappa surtout pendant cette nouvelle visite, et à quoi je ne m’attendais pas, ce fut le nombre élevé d'Adoration des mages que le musée renfermait. J'ai consacré au thème pas mal de billets et, je le jure, je n'avais aucunement l'intention de jouer les prolongations. Celles-ci se sont en quelque sorte imposées. Que celles et ceux qui en ont soupé de Melchior, Gaspard et Balthazar (je peux les comprendre) s'épargnent donc la peine d'aller plus loin. 

Car j'ai l'intention de procéder à un petit inventaire des Adorations tourangelles (bien aidé en cela par le travail de Pierre Dubois en 2021).

Et commençons donc par la plus ancienne (et ce n'est pas la moins belle), celle de Naddo Ceccarelli, datant du deuxième quart du 14ème siècle, sous la forme d'un diptyque représentant aussi L'Annonciation au registre supérieur.

Tempera et or sur bois. H. 61 cm L. 26,5 cm (chaque panneau)

J'ai trouvé une petite vidéo explicative dont le texte a été écrit par Pierre Fresnault-Deruelle, sémiologue que je connaissais de par son travail sur la bande dessinée (il fut un des premiers universitaires à prendre cet art au sérieux).

 

 La seconde Adoration est l’œuvre d'un Flamand anonyme, datée aux alentours de 1520-1525 :

 

Gaspard, le roi noir, est à l'écart, sur le panneau latéral droit, une position habituelle pour lui, on l'a déjà observé chez Bruegel et Bosch. On notera la somptuosité là encore de la tenue, la finesse ouvragée de l'armure (mais en est-ce vraiment une ?), du plastron aux jambières. 

La troisième a d'abord ceci de particulier qu'elle est l’œuvre d'une femme, Mechtelt van Lichtenberg toe Boecop, une des rares femmes peintres hollandaises dont le nom soit connu. Née à Utrecht vers 1520, elle aurait été l'élève de Jan van Scorel, un peintre à qui on attribue l'introduction aux Pays-Bas de l'art de la Renaissance italienne. C'est la présence du blason de la famille Boecop dans la partie supérieure droite du tableau qui a laissé supposer que cette Adoration des mages avec un groupe de donatrices pourrait avoir été peinte par Mechtelt.

 

Curieux tableau avec le roi noir portant haut une sorte de ciboire contenant son présent. Son costume, avec la jupette en lanières, n'est pas sans rappeler celui du Gaspard de l'Adoration anonyme. Le Melchior chauve, avec sa couronne résiduelle de cheveux, ressemble beaucoup aussi à son prédécesseur, ainsi que la coupe qu'il tient en main.

 

Plus étrange encore la position de Balthazar. La tête ne semble pas à sa place, à mon sens bizarrement désaxée par rapport au reste du corps. On ne sait si sa main gauche tient elle aussi une coupe ou bien si c'est le personnage situé à gauche, qu'on dirait porteur d'un sceptre. Les deux mains se touchent d'une manière ambiguë. Par ailleurs ledit personnage affronte du regard l'homme barbu situé un peu en-dessous de lui. Scène pour le moins énigmatique.

 

Et enfin il y a ces deux personnages dans le coin supérieur gauche, qu'on dirait grimpés à un poteau comme pour mieux voir la scène. La tête du second ne correspond pas anatomiquement au corps que l'on voit de dos. Le bras tendu semble lui appartenir mais il ne peut être que celui du premier homme, vu l'orientation de la main.


 La suite au prochain épisode.


 

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