dimanche 31 janvier 2016

Savannah

De la médiathèque, je ramenais la semaine dernière plusieurs livres. Mais celui sur lequel je me jetai sans attendre, laissant en plan toute autre lecture commencée, ce fut Savannah de Jean Rolin. J'ai déjà écrit ici sur Jean Rolin, à propos d'un autre de ses ouvrages (qu'il ne nomme pas romans) : Ormuz. Et si je récidive, ce n'est pas pour partager quelque savoir dont cette lecture nous enrichirait, mais bien plutôt pour partager une expérience, une traversée du monde qu'on ne saurait ici sans dérision qualifier du nom d'aventure.
Ce qui est déjà très particulier dans les histoires de Jean Rolin, c'est qu'on peut les suivre sur une carte, mieux, sur Google Earth. Je l'avais fait pour Ormuz, et il était clair que bien que le récit était fictionnel, en revanche les lieux décrits étaient scrupuleusement réels. Il en est de même pour Savannah, qui se place donc en Géorgie (pas la Géorgie de Staline, mais celle de Flannery O'Connor, qui y naquit, et dont la maison, à Milledgeville, était le but du voyage qu'il fit sept ans plus tôt avec Kate Barry).

"Le mercredi 27 août 2014, à l'aéroport d'Atlanta, j'ai pu changer ma réservation pour le trajet suivant et emprunter presque aussitôt un vol à destination de Savannah. En 2007, à la suite de ce retard dû à la météo, nous n'étions arrivés dans cette dernière ville que tard dans la soirée, comme en témoignent les images faites par Kate lors de notre installation dans un motel situé au confluent de River Street et de Martin Luther King Jr. Avenue." (Savannah, p. 18)
Ce court extrait a le mérite de poser l'essentiel. Le livre tout entier raconte le retour de l'auteur sur les lieux mêmes arpentés en 2007 avec Kate Barry, avec l'appui des images tournées alors par celle-ci, et qu'il a revisionnés avec la plus extrême attention.
Faut-il préciser que Kate Barry était la fille de Jane Birkin et du compositeur John Barry (en fait un pseudonyme, son vrai nom étant Prendergast) ? Et qu'elle a trouvé la mort en se défenestrant de son appartement parisien le 11 décembre 2013 (la notice Wikipedia assure que l'on n'a pas pu déterminer s'il s'agissait d'un suicide ou d'un accident).
Mais de cette issue tragique, Jean Rolin ne parle pas. Le fait est supposé connu, il n'y revient pas. Ce voyage à Savannah, jusqu'à la maison de Flannery O'Connor, est un essai pour retrouver les traces du premier voyage, les chambres de motels louées, les routes empruntées, les bars, les quais et les cimetières visités. Dérive mélancolique, dénuée de tout pittoresque (Kate Barry partageait d'ailleurs le goût de Jean Rolin pour les terrains vagues, les friches portuaires, ce qu'il nomme les lieux indécis, mouvants, et il évoque aussi en passant une autre excursion antérieure vers un cimetière de navires perdu près d'un marécage, à Staten Island, dans l'Etat de New York).

"Dans quelle mesure cette histoire de poule, et d'élevage de paons, a-t-elle influencé le goût de Kate pour la personne et l'oeuvre de Flannery O'Connor ? Je n'ai pas de réponse à cette question, pas plus que depuis sa mort, et bien que j'aie relu entre-temps tous les livres de Flannery O'Connor, en particulier ce volume de sa correspondance dans lequel Kate avait corné des pages et souligné au crayon de nombreux passages, je ne suis parvenu à déterminer exactement pourquoi elle s'était prise d'un tel amour pour cet auteur, au point d'envisager de réaliser un film sur elle, et auparavant de m'entraîner en 2007 dans un voyage à Savannah, où Flannery était née, et de là à Milledgeville, dans le fin fond de la Géorgie, où elle avait vécu la plus grande partie de sa vie, brève, et composé la quasi-totalité de son oeuvre." (p. 11)

 Le récit est rythmé par les évocations des films de Kate, tournés de manière presque compulsive, au grand agacement parfois de Jean Rolin, ce dont il ne se cache pas, le plus souvent sans cadrer de personnages dans le décor mais préférant filmer les pieds, les sols, les chaussures. La seule exception à cette règle, écrit-il, "c'est lorsque Kate filme son reflet, ou nos deux reflets conjugués, dans le rétroviseur d'une voiture, dans la vitrine d'un musée ou de préférence dans une flaque d'eau, à la surface de laquelle il arrive que se reflètent aussi le couronnement d'un palmier ou le feuillage d'un arbre."

 Je ne crois pas spoiler le livre en disant qu'il n'y aura pas de révélation, que ce périple de remémoration ne livrera pas de leçon de vie à la Paulo Coelho, que les questions sans réponse le resteront. Cependant la figure de Kate Barry, la figure d'un être généreux et spontané, en aura été un peu éclairée, par la bande, par un système de reflets justement, par cette écriture sans forfanterie qui atteint des sommets dans un passage comme celui-ci :

"Dans la soirée, ayant constaté qu'il n'y avait rien à manger dans le voisinage du motel [...], je dus me résoudre à gagner le supermarché Walmart, dans la direction de la ville, sur le parking duquel Elizabeth Wylie m'avait signalé la présence d'un bon restaurant thaï. Et le plus étonnant, c'est que ce restaurant était bon, effectivement, et thaï, même si sa situation était quant à elle détestable, et s'il me fallut pour l'atteindre, et pis encore pour en revenir, dans une obscurité à peu près complète, désormais, longer sur un peu moins d'un kilomètre la 441, éprouvant à nouveau que le plus sûr moyen de se donner l'illusion d'être un laissé-pour-compte, un moins que rien, c'est encore de marcher seul sur le bas-côté non aménagé d'une route à grande circulation, si possible aux Etats-Unis, et de préférence à la tombée de la nuit." (pp. 98-99)

 

lundi 25 janvier 2016

Sommeil que tu traverses comme une rivière

Je n'étais pas très convaincu au moment d'y aller. C'était plus hier soir une envie de cinéma, une envie de s'abîmer une fois encore devant le grand écran du cinéma, que l'envie spécifique de ce film, Comme un avion, de Bruno Podalydès, que j'avais raté lors de sa sortie et qui devait au festival Télérama de revenir à l'Apollo.
Et pourtant quel bain de jouvence que ce film qui, très vite, dès les premières images, m'a happé, emporté dans son rythme tranquille et son humour jamais acide ; moi qui avait été ces dernières semaines d'une trop grande porosité à l'actualité, à la tragique situation du monde, j'oubliais tout, le temps de la dérive dérisoire, placide et sensuelle de ce kayakiste, le réalisateur lui-même, qui voudrait atteindre la mer pendant sa semaine de congé mais prenant par exemple le mauvais bras de rivière échoue dans un fossé à la périphérie d'un super U. Lui, le passionné de l'Aéropostale, qui emmène le Vol de nuit de Saint Ex dans son périple préparé avec minutie, n'ira pas plus loin qu'une auberge furieusement bucolique où il s'enivrera d'amour et d'absinthe.


Kayak, avion sans ailes (et l'on peut entendre au moment où il s'élance sur les eaux vertes la chanson de Charlélie Couture qui donne son titre au film, et je pense que peut-être le nancéen n'a jamais réussi par la suite à écrire une chanson meilleure que celle-ci, en tout cas une chanson qui nous emporte autant, avec sa mélancolie légère et son énergie de nuit blanche sous l'orage - et je pense aussi à cette autre chanson, placée plutôt vers la fin, la Vénus écrite par Gérard Manset  et merveilleusement chantée par Alain Bashung,dont je ne revois pas sans émotion la vidéo ci-dessous tournée semble-t-il peu de temps avant sa mort en 2009.)


 Oui, ce film m'a fait du bien, m'a transporté dans cette intemporalité que donnent aussi l'amitié parfois et l'amour à ses heures hautes, dans ces parenthèses du temps dont on sait bien qu'elles devront se refermer, qu'elles ne dureront que le temps d'une saison, d'un été ou d'une nuit.

Et plus tard, dans la nuit, une fois refermé le beau volume de Retrouver l'aube, le troisième opus de Jean-Claude Ameisen hissé sur les épaules de Darwin, sur le chapitre des chauve-souris dessinant les contours du monde grâce à l'écho de leurs cris, j'allais en quête d'écholocalisation poétique parmi les livres lus ou à finir de lire, livre de Thierry Metz par exemple, emprunté à la médiathèque, ses Lettres à la bien-aimée (1995), écrites de son propre aveu pendant un stage de maçonnerie à Périgueux, alors que son fils Vincent, huit ans, avait été tué par une voiture le 20 mai 1988, drame dont le poète ne se remettra jamais (il se donne la mort le 16 avril 1997).

Et je parcours une nouvelle fois le court volume, ces textes sans titre, qu'il dit "passages plus que lettres", et page 70, je rencontre des vers qui sont autant d'échos aux images du film :

Tu dors.
Sommeil qui va toucher le fond, qui me ramène une algue.
Sommeil que tu traverses comme une rivière.

Plus rien que l'eau.
Et seule dans ta source, ma main.

Tu dors le dos rond et lisse, livrée à ta chevelure, au bouillonnement de ton rêve.

Nuit où tu me laisses ton repos, comme une barque.
Pour aller où je veux.

Chaque page évoque cet amour adossé au malheur, la poignante tendresse de ceux qui luttent ensemble contre le vertige de l'absence.

Page 86 : Je ne dis rien, je te cueille un épi de lavande, je prends ta main sous la pluie. On regarde ce bout de jardin, les acacias de la colline. C'est tout.
De ton regard je ramène une constellation.

De ton regard je ramène une constellation. Vers sublime que je garde en moi, qui tire sa force lyrique de la simplicité des lignes qui précèdent.

Et comme le sommeil n'a pas encore abattu mes dernières défenses, je m'attarde sur un des livres rapportés de Bruxelles, de la brocante de la place du Jeu de paume, La chasse aux trésors, d'Henri Thomas, paru dans la NRF en 1961 (l'année de la naissance de Bruno Podalydès, un an après la mienne), un recueil d'essais que son premier lecteur a lu avec attention, comme en témoigne les nombreux soulignements au crayon de papier, mais pas jusqu'au bout : à la page 130, soudain, les pages ne sont plus coupées (seul José Corti aujourd'hui maintient cet usage du livre aux pages à découper).
Bref, je vole sans me poser d'une page à l'autre, jusqu'à cette page 102 où je peux lire :

"Je préfère rouvrir Les Fleurs du Mal et m'intéresser une fois de plus aux variantes et corrections apportées par Baudelaire. Un mot, une syllabe modifiés changent toute la constellation du poème ; dans les limites du mètre le plus strict, de profondes opérations s'accomplissent par d'infimes déplacements de sonorités."

La constellation du poème. Les échos profonds de la nuit avaient parlé. Il était temps de mettre fin à cette chasse subtile.

jeudi 7 janvier 2016

Ruqia Hassan

Rien écrit ici depuis le 8 décembre, alors que j'avais presque trouvé une vitesse de croisière à raison d'un billet tous les deux ou trois jours. Mais je ne sais pas trop ce qui s'est passé, ce qui s'imposa à moi depuis lors ne trouvait pas à s'inscrire sur le site, cela s'écrivait au crayon de papier, archaïquement, sur un carnet dont la publication n'est pas à l'ordre du jour, ou bien dans un nouveau cahier suscité par quelques rêves marquants et que j'ai nommé Carnet de la Méduse, car la Gorgone, sous différentes formes, en était le motif récurrent.

Et je ne serai pas revenu ce jour sur Alluvions si je n'avais pas lu cette nouvelle qui m'a écœuré, parmi bien d'autres nouvelles écœurantes, mais celle-ci je n'avais pas envie de la laisser passer, je voulais qu'elle eut un écho, aussi petit soit-il, à cet endroit où je fais entendre ma faible voix.
Je suis las des polémiques sans fin sur la déchéance de nationalité, la une de Charlie, la pertinence du concept d'islamophobie, las du mépris, de la morgue et de l'auto-satisfaction béate qui règnent sur tant de forums et autres fils de commentaires FB, las de ces gens qui donnent volontiers des leçons de courage, bien planqués qu'ils sont derrière leur clavier et souvent l'anonymat d'un pseudo.

Le courage, le vrai courage, il était chez cette femme, la journaliste  syrienne Ruqia Hassan, que l’État islamique vient d'exécuter pour "espionnage". "Elle écrivait, peut-on lire sur le site Sans Compromis, sur les conditions de vie des habitants dans les territoires syriens occupés par Daesh ainsi que sur les bombardements effectués sur Raqqa. Elle prenait part à toutes les protestations contre l’EI et était une fervente partisane de la révolution syrienne contre Assad. Elle n’a jamais raté une protestation anti-Assad."



Ses derniers mots sur Twitter :

« Là, je suis à Raqqa. J’ai reçu des menaces de mort. Daesh va sans doute m’arrêter (…) et me décapiter. Mais je garderai ma dignité : il vaut mieux mourir que s’humilier »

On a tué la beauté, le courage, l'intelligence. Et je sais bien que ce n'est pas la première fois, ni la dernière, mais mon dégoût sera toujours le même, pour les brutes sanguinaires au cœur atrophié.
Il y a vraiment de quoi désespérer du monde.

mardi 8 décembre 2015

Les loups sont entrés dans Paris

"Et la voilà la bête qui fait peur même au lion ce gros fainéant des pays chauds. Le loup ! Le loup qui peut faire « ses cinquante lieues en une nuit à la queue leu leu » et qui arrive du bout de l’hiver, pas de ces pays du soleil où nous, nous allons en vacances safaris.
Le grand méchant loup menace d’envahir Paris et contre lui on construit une barrière,  une place forte là où ses ancêtres chassaient en meute: le Lou-vre."
Voilà, c'est un extrait de l'un des deux textes que l'ami Francis, alias Paul-Charles, m'a envoyé, qu'on lira peut-être dans un prochain Torticolis. Les traces des bêtes sauvages dans l'histoire de Paris, par un parisien un peu nostalgique d'un Paris populaire enfui.
Les loups sont entrés dans Paris, y ont semé le meurtre et la désolation. Mais la métaphore tient-elle toujours ? Les hommes sont plus cruels que les bêtes sauvages, qui ne tuent que torturés par la faim. Seule notre espèce est capable de fanatisme. On pourrait à raison écrire que le fanatisme, plus que le rire, est le propre de l'homme.

Le soir-même, je vais voir à l'Apollo le film d'Alexandre Sokourov, Francofonia, qui raconte justement l'histoire du Louvre sous l'occupation.


 Histoire presque incroyable que ce pacte tacite entre deux amoureux de l'art, Jacques Jaujard, directeur du grand musée français, et le comte allemand Franz Wolff-Metternich, responsable de la Kunstschutz, mission allemande de conservation des œuvres d’art. Jaujard n'avait pas attendu l'invasion pour envoyer, ignorant les injonctions du gouvernement de Vichy, les trésors du Louvre à l'abri à Chambord et dans plusieurs châteaux de province, mais on aurait pu imaginer que Metternich, pourtant membre du parti nazi, aurait exigé le retour des pièces, mieux, aurait organisé leur départ pour Berlin. Il n'en fait rien, ferme les yeux et même gagne du temps sur les exigences de ses supérieurs en faisant tourner à fond la machine bureaucratique. Il est rappelé en 1942, et envoyé sur le front de l'est.




 Le film lui-même n'a rien d'un documentaire bien sage, du type des actualités de l'Ina ci-dessus. Non, c'est un montage sophistiqué, un vaste collage où Sokourov mêle archives et reconstitutions, où l'on croise Tchekhov et Tosltoï sur leurs lits de mort, Marianne égrenant un peu sottement la devise républicaine et un Napoléon arrogant légèrement ridicule, commentaires du cinéaste lui-même et image pixelisées d'un cargo aux containers chargés d’œuvres d'art pris dans la tempête. Un patchwork qui a suscité tout à la fois les adhésions émerveillées et les critiques furibondes. Moi, j'en aime en tout cas la poésie, et même le côté foutraque.

Il est singulier que Sokourov ait eu beaucoup de difficulté à retrouver des traces de Jacques Jaujard. Pas d'archive, seulement quelques photographies. Il dit avoir  même eu du mal à savoir où il était enterré. La France fut longtemps bien ingrate avec le principal sauveur de son patrimoine artistique (les choses s'arrangent, on peut même  trouver un serious game pour se mettre dans la peau de Jacques Jaujard).

En m'informant plus avant sur cette histoire, j'ai découvert incidemment le rôle important qu'a joué une femme comme Rose Valland. Attachée de conservation au musée du Jeu de Paume, elle dresse un inventaire précis des œuvres qui y transitent. Elle noircit des centaines de fiches, en n'hésitant pas à aller chercher les papiers carbone allemands dans les poubelles du musée et à espionner les conversations des officiels nazis. Elle informe la Résistance sur les trains qui transportent les œuvres, afin que ces convois soient épargnés.
A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf
A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf

A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf
"A la signature de l’armistice, écrit Emmanuelle Polack, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche."

A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf
A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf
A la signature de l’armistice, Rose Valland intégrera l’état-major de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny, se rendra en Allemagne afin d’y mener des enquêtes pour l’identification et le retour des biens culturels reconnus comme appartenant au patrimoine artistique français. Son action d’agent de liaison au sein de la Commission de Récupération Artistique (CRA) conjuguée à celle des Alliés permettra le retour d’environ 60 000 objets sur environ 100 000 transférées en Allemagne et en Autriche. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1332#sthash.cah5vHsU.dpuf

Rose Valland
 Je découvre aussi que cette historienne a également scénarisé une bande dessinée sur la vie de Rose Valland, Rose Valland, capitaine Beaux-Arts, aux éditions Dupuis.

Et le monde étant petit, elle est aussi l'auteur d'un guide sur les fresques de Vic, (où nous devons nous rendre en février prochain avec quelques étudiants, dans l'optique d'un projet avec l'école maternelle du village).

Le baiser de Judas, église Saint-Martin de Vic

jeudi 3 décembre 2015

Manhattan, de Woody à Léo

« C'est alors que m'est revenu cette vieille blague... Vous savez, ce gars qui va chez le psychiatre et dit : « Docteur, mon frère est dingue, il se prend pour une poule ! ». Et le docteur lui répond : « Ben c'est simple... faites-le interner ! ». Et le type dit : « J'aimerais bien, mais j'ai besoin des œufs ». Et bien, moi c'est comme ça que j'ai tendance à voir les relations humaines. Au fond, elles sont totalement irrationnelles, dingues, absurdes… Mais il semble que nous faisons avec parce que la plupart d'entre nous ont besoin des œufs… ».
C'est ainsi que Woody Allen (Alvy Singer dans le film), conclut Annie Hall, sa comédie sortie en 1977, et que j'ai revue lundi soir sur Arte. C'est brillant, sensible, drôle, profond et... incroyablement bavard (pour moi, qui aime au fond de plus en plus les films contemplatifs où la parole sait s'effacer devant l'image, j'étais comme dépassé, et, la fatigue aidant, il m'est arrivé, je l'avoue sans honte aucune, de laisser parfois mon esprit divaguer). Ce qui est émouvant, en tout cas, à travers cette histoire d'un amour perdu, c'est le double éloge d'une femme et d'une ville. La femme, c'est Diane Keaton, qui partagea un temps l'existence du cinéaste mais continua de faire des films avec lui après la rupture, devenant en quelque sorte sa meilleure amie. Le ressentiment n'a pas succédé à l'amour, bien au contraire.

Diane Keaton
La ville, c'est New York, la seule où il lui semble possible de vivre.
Dans Manhattan, deux ans plus tard, il remettra en scène la ville et la femme. Il joue Isaac Davis, scénariste de télévision désabusé, empêtré dans une vie sentimentale compliquée, qui tombe amoureux de  Mary, la maîtresse de son meilleur ami - rôle interprété une nouvelle fois par Diane Keaton. L'amour de la ville et de la femme est comme condensé dans le célèbre plan tourné au pied du Queensboro Bridge, où le couple est assis sur un banc dans la brume qui se lève de l'East River.

Extrait de Manhattan

***

Au sortir du film, j'abordai la troisième histoire des Rêveurs lunaires, le troisième génie qui a  changé l'histoire, et là je dois dire que si je connaissais Heisenberg et Turing, les deux précédents, j'ignorais tout de celui-ci, Léo Szilard, le savant juif hongrois (et c'est l'un des mérites de l'album que de redonner la place qu'ils méritent à des hommes méconnus qui ont pourtant eu une influence cruciale sur la marche du monde).

Je suis saisi d'entrée, dès la première case :

Les rêveurs lunaires, p.96.


Neuf janvier 1960, New York. Le jazz, que Woody Allen aime tant (il joue de la clarinette dans un groupe de New Orleans). Albert Camus vient de mourir le 4 janvier dans un accident de voiture, à Villeblevin dans l'Yonne. Leo Szilard, atteint d'un cancer, va subir une radiothérapie, à des doses de cheval (mais c'est lui qui le demande : il a obtenu de pouvoir participer au protocole des soins). Le personnage est passionnant, et je ne veux pas ici reprendre tout ce que Cédric Villani dévoile de sa biographie. Qu'il suffise pour l'instant de signaler qu'il fut le premier humain à concevoir, dès 1933, la possibilité d'une réaction neutronique en chaîne, donc d'une bombe atomique aux possibilités de destruction inouïes, et à comprendre ensuite que le tout nouveau régime nazi était le mieux placé, de par l'avancée de la science de son pays, pour mettre au point cette invention.

C'est ce qui l'amènera en 1939 à demander à Albert Einstein d'adresser une lettre à Franklin Roosevelt, le président américain, pour l'alerter sur le danger et le convaincre d’accélérer la recherche expérimentale sur la réaction en chaîne en Amérique. Lettre signée Einstein mais c'est lui, Léo Szilard, qui en a rédigé le brouillon.
Et c’est en 1942, avec le physicien italien Enrico Fermi, dans le cadre du Projet Manhattan visant donc à doter l’Amérique d’une bombe atomique, qu’il parvient à créer la première réaction en chaîne avec un réacteur utilisant du graphite et de l’uranium.
Lui, pacifiste convaincu, qui s'opposera à l'utilisation de cette bombe, qui condamnera l'horreur d'Hiroshima, mais que les militaires, une fois la bombe réalisée, s'empresseront de mettre sur la touche.

Les rêveurs lunaires, p. 141.

***

Roger Caillois, le 9 août 1945, écrit de Londres à Victoria Ocampo. Il arrive précisément de New York, où il vient de faire un bref séjour. Il évoque la bombe en deux phrases, en tout et pour tout (nous sommes loin de Camus) :
" (...) Les gens sont très agités (intellectuellement et moralement) par la bombe atomique. De fait, il y a de quoi. John Lehmann est en vacances. Je lui ai laissé des messages. On fait des meetings pour l'anniversaire de la mort de Tagore. Strafford Crips y parle. Les encaisseurs de banque sont toujours en haut de forme et le chapeau melon toujours aussi porté. L'Angleterre est décidément éternelle. (...)"



Le premier morceau du disque se nomme aussi Manhattan.

dimanche 29 novembre 2015

Maria, Albert et les rêveurs lunaires

Sur Facebook j'ai vu les photos de la lecture qu'ont donnée mes amis, les Troubadours du confluent, à la Maison du comédien, à Alloue. Lecture de Slamkara, pièce écrite par Edouard Elvis Bvouma, auteur camerounais en résidence dans cette ancienne propriété de Maria Casarès. Autour de la table recouverte de la toile cirée rouge et blanche, Michel, Marie, Georges, Françoise et le jeune dramaturge. Dans ce petit coin de Charente, en ce paisible domaine lové dans une boucle du fleuve languide, visité cet été avec toute la troupe avant de jouer en nocturne dans le village, se donnait donc à entendre le bruit du monde, l'écho de sa fureur et de ses crimes. Je lis sur le site de la Maison : "Par le biais de joutes oratoires, la pièce interroge les luttes révolutionnaires pour la liberté en Afrique, en s'appuyant sur le combat de Thomas Sankara, président du Burkina Faso assassiné en 1987, surnommé le Che africain et célébré par toute la jeunesse africaine 30 ans après sa mort." Joutes oratoires, slam (je constate donc que le titre de l’œuvre est un mot-valise avec slam et Sankara), c'est bien ce dont ils m'avaient prévenu la semaine dernière, un peu inquiets devant cet exercice qui certes allait être nouveau pour eux... Même s'ils devaient répéter dans la semaine (je suis tout de même curieux de savoir comment ça s'est passé...).

***


C'est après la mort, en 1960, d'Albert Camus, avec qui elle entretenait une liaison discrète et passionnée, que Maria Casarès achète La Vergne - manoir décati, perdu dans la province française -, attirée par la photo du perron qui, semblerait-il, lui rappelait les maisons de sa Galice natale. Jusque là, elle ne possédait rien en France : ce sont ses amis, parmi lesquels André Schlesser (qu'elle épousera par la suite), qui l'incitèrent à l'achat, pour la détourner aussi de l'immense chagrin qui l'avait assaillie.
Elle viendra ici de plus en plus souvent  se reposer de ses longues tournées et des tournages de films. Elle y meurt le 22 novembre 1996 et repose à côté de son mari dans le cimetière d'Alloue. C'est pour remercier la France d'avoir été terre d'asile (elle fuit avec ses parents la guerre d'Espagne et arrive à Paris le 20 novembre 1936), qu'elle a fait don à la commune, elle qui était sans descendance, du domaine et du manoir, devenu donc un lieu dédié au théâtre, à l'accueil de troupes et d'écrivains.

Le site Des lettres publiait justement, dimanche dernier 22 novembre, une magnifique lettre d'amour à Albert Camus, jamais envoyée. Extrait :

"Mardi 3 août — Deux jours entiers de passés sans t’écrire mais pas une heure, une pensée, une tristesse vague, un plaisir quelconque, une lecture, une promenade, un lever, un coucher qui ne mènent directement à toi. Est-ce que je souffre de ton absence ? Oui. Est-ce que je suis malheureuse ? Non.
Avec une patience dont je ne me serais crue capable, j’attends. J’emploie chaque jour, chaque seconde qui s’écoule à m’approcher de toi. Tout instant fini me comble de joie par le fait qu’il ne se pose plus entre toi et moi. Tout instant à venir m’est doux car il se trouve dans mon chemin vers toi.
Ce n’est pas je t’assure fausse littérature. C’est en moi comme la faim et le soleil. Ce n’est pas non plus romantisme. Je ne suis pas le moins du monde altérée et toute ma vie de vacances s’écoule dans un calme de corps et d’esprit qui est nouveau pour moi.
C’est tout simplement que je t’aime et que tu sois près ou loin, tu es toujours là partout et que le seul fait que tu existes me rend pleinement heureuse. […]"


 ***

De Camus, il est question encore dans Les rêveurs lunaires, la superbe bande dessinée que je lis ces jours-ci, de Cédric Villani et Edmond Baudoin, sous-titrée Quatre génies qui ont changé l'histoire. Le premier de ces quatre génies étant Werner Heisenberg, que la narration, dédaigneuse de parcourir la biographie du physicien de sa naissance à sa mort, montre dans le manoir de Farm Hall, le 6 août 1945, en compagnie de neuf autres scientifiques allemands, prisonniers des Alliés et à l'écoute ce soir-là de la BBC, à l'écoute de la plus mauvaise nouvelle, peut-être, que l'humanité ait jamais reçue : la bombe atomique larguée sur Hiroshima. 
 

Et pourtant, pour la plupart, cela n'apparut pas comme une mauvaise nouvelle, loin de là, et c'est ce que mettent en évidence Baudoin et Villani, qui se représentent eux-mêmes en discussion, remarquant que parmi toutes les réactions d'alors à la bombe atomique, il y eut bien peu de compassion pour les victimes, y compris chez les intellectuels français, "à l'exception notable d'Albert Camus, qui a dû faire face aux critiques. Pour avoir écrit un éditorial historique." 

C'est dans le numéro de Combat du 8 août 1945 :
"Le monde est ce qu'il est, c'est-à-dire peu de chose. C'est ce que chacun sait depuis hier grâce au formidable concert que la radio, les journaux et les agences d'information viennent de déclencher au sujet de la bombe atomique. On nous apprend, en effet, au milieu d'une foule de commentaires enthousiastes que n'importe quelle ville d'importance moyenne peut être totalement rasée par une bombe de la grosseur d'un ballon de football. Des journaux américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur l'avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques. [...]"
"Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie." Oui, Camus, le seul grand intellectuel à avoir pris toute la dimension  de l'événement, à en avoir pénétré l'horreur.

 Un petit coin de Charente, 
"au bord du courant qui allait rejoindre l'Océan,"*
et la fureur du monde.
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* Maria Casarès, Résidente privilégiée, Fayard, 1980. (Son autobiographie)

mercredi 25 novembre 2015

Patagonie

Dimanche, à Saint-Germain, Emmanuel nous fait goûter un vin rouge qu'il a mis en carafe. A nous d'en deviner l'origine. Je n'ai pas d'illusion sur mes compétences en œnologie , mais qu'importe, on joue le jeu. La robe sombre du breuvage, le roulis des tannins font penser à du Bordeaux mais ce n'est pas le cas : notre hôte a concédé qu'il tapait dans les 14 degrés, trop fort pour un Bordeaux. C'est un étranger, un vin migrant, sans papier, charnu et charmant, le bougre. Je ne sais pourquoi, je pense à un chilien. C'est sûr, ils vont m'embaucher chez Parker, car c'est bien ça, un pinard chilien.

***
Correspondance Roger Caillois - Victoria Ocampo. J'aborde l'année 1942. Caillois, avec sa femme Yvette, prend le bateau jusqu'en Patagonie. Cabines minuscules, mal de mer affreux. Il écrit à Victoria le 15 mars de Magallanes :

Nous sommes arrivés hier sans plus de mal de mer. Tous ces points de la Patagonie sont des sortes de camps volants. Des baraques de tôle au lieu de tentes, mais le même manque de racination [?]. Quand je pense que tu te plaignais de Santiago del Estero ou de Zarate ! Ici, la mousse est dure comme de la pierre : les cailloux les plus pointus ne l'entament pas, ne la raient pas. [...] Et dessus souffle le vent, froid et rapide. Je pouvais à peine me tenir dans les rues à Rio Gallegos : mais on disait que ce n'était qu'un souffle.
Patagonie, Roger Caillois, Editions de l'Aigle, 1942.
 Ce voyage fut en réalité décisif  pour la vocation littéraire de Caillois. A son retour, il écrivit Patagonie, un texte bref et intense qui ne sera publié en France qu'en 1946, et dédié précisément à Victoria Ocampo. Il revient sur sa genèse dans Le Fleuve Alphée :

Je fus si frappé par une randonnée en Patagonie que je ne pus m'empêcher de jeter sur le papier quelques-unes des impressions que j'avais ressenties. Le jour où je les publiai, épurées cependant de tout détail anecdotique ou pittoresque pour donner à mes pages la même nudité que celle de la contrée qu'elles s'efforçaient de décrire, ce jour-là, je devins écrivain malgré moi.
***

Ce même dimanche, je file en soirée à l'Apollo pour voir le dernier film du chilien Patricio Guzmán, Le bouton de nacre (El botón de nacár). Si je tiens à ne le manquer à aucun titre, c'est la faute de Jean-Claude Ameisen, dont j'ai relu récemment le début des "Battements du temps", le premier tome de la série Sur les épaules de Darwin
"Le présent n'existe pas, dit Gaspar Galaz, un astronome qui explore les vastes étendues du ciel qui se déploient au-dessus des télescopes de l'observatoire géant de Cerro Tololo, au nord du Chili, sur les hauts plateaux du désert d'Atacama. Galaz parle à Patricio Guzmán.
C'est un extrait du film splendide de Guzmán, Nostalgie de la lumière." (p. 11)
A ce film, tourné dans l'extrême nord du Chili, fait donc pendant Le bouton de nacre, tourné dans l'extrême opposé, la Patagonie occidentale, le plus vaste archipel au monde, un immense labyrinthe aquatique qui n'a pas encore été entièrement exploré. Au désert minéral du premier, se substitue l'océan du second ; au sable et à la roche, l'eau sous toutes ses formes, des vagues jusqu'aux glaciers. Mais c'est aussi l'histoire des hommes qu'évoque Patricio Guzmán, l’histoire tragique des Amérindiens décimés par les colons, l'histoire tragique des prisonniers de Pinochet que les hélicoptères des tortionnaires lâchaient dans la mer, lestés par des rails de chemin de fer.
El botón de nácar from trigon-film on Vimeo.

Le film navigue ainsi, d'images sublimes de beauté, vertigineuses et cosmiques, en émouvantes photographies de peuples disparus et de rescapés de la dictature, mêlant l'actuel et l'immémorial, la goutte d'eau emprisonnée dans le quartz et la violence des tempêtes sur les canaux innombrables de la Terre de Feu.

Impossible d'oublier le visage buriné de Gabriela, une des dernières descendantes directes des peuples aborigènes, donnant une leçon de vocabulaire dans la langue des Kaweskar, puis racontant un périple de mille kilomètres en canoë alors qu'elle était encore une petite fille.
Entendre claquer ces mots pratiquement condamnés au néant, comme assister au délitement inéluctable d'une fresque antique dans l'air corrompu du dehors.


"Contrée toute d'espace et d'appel qui compose sur le sol un site comme il faudrait avoir l'âme..."

(Dernière phrase de Patagonie, de Roger Caillois, in Quarto/Gallimard, Oeuvres, 2008)