mercredi 10 janvier 2018

La bio du biographe

L'autre jour, ne m'en voulez pas, j'ai un peu simplifié. En réalité, il n'y avait pas deux fils - la porcelaine et Moby Dick - mais trois. Une tresse.
Je m'explique : dans le dernier article de l'année 2017, parmi les pistes à explorer, j'avais mentionné brièvement la romancière britannique A.S. Byatt. Une piste suggérée encore une fois par Rémi Schulz, dans un commentaire du 21 décembre sur l'article 13, rue Linné.

"Ceci me rappelle qu'il est question de Linné dans le vertigineux Conte du biographe, de AS Byatt, où un biographe envisage d'écrire la bio d'un biographe..."
Il n'en fallut pas plus pour déclencher une envie furieuse de découvrir cette auteure que je ne connaissais absolument pas. Et ce roman-ci en particulier. Je le commandai donc presque aussitôt.

Je lus donc fin décembre-début janvier deux livres en parallèle : Le Conte du biographe et La voie blanche d'Edmund de Waal.
En faisant des recherches sur le net au sujet d'Edmund de Waal, je tombai sur un article du Guardian du 2 mai 2014 : Porcelain ghosts: the secrets of Edmund de Waal's studio. Je ne le lus pas tout de suite (il fallait que je m'arme de courage et d'un bon site de traduction pour en saisir toutes les finesses). L'onglet resta ouvert plusieurs jours de suite.
Je n'avais pas fait attention à l'auteur : pourquoi faire ? je ne connais aucun des journalistes du Guardian. Or, en l'occurrence, je finis par m'aviser que ce n'était pas un(e) journaliste qui avait rédigé l'article mais... AS Byatt elle-même.


Porcelaine, Moby Dick, AS Byatt, tout se reliait. Une tresse à trois brins, vous dis-je.

Enfonçons gaiement le clou : le commentaire de Rémi ajoutait : "Et Byatt est une fan de Turing et Fibonacci." Cliquons donc sur le lien qui est donné, et nous débouchons sur Here's to you, Alan and Bart, publié le 21 janvier 2013, qui commence ainsi :
"AS Byatt a donc écrit une tétralogie, parfois nommée Frederica, car elle est centrée sur Frederica Potter, qui a quelques traits communs avec Byatt, bien qu'elle soit née le 24 août 35 (alors que Byatt est née le 24 août 36). "
Frederica Potter. Or, potter c'est tout bonnement le nom anglais pour potier. Un nom que l'on retrouve par ailleurs très souvent dans Le chardonneret de Donna Tartt, puisque Potter est le surnom de Theo Decker, le personnage principal. C'est avec ce nom que Boris l'interpelle lors de leurs retrouvailles à Manhattan :
"J'étais sorti du bar et j'avais atteint le milieu de la rue quand j'ai entendu un cri derrière moi : "Potter !" (p. 538)
Enfin, le dernier épisode de ma fiction 1967 évoquait le village de Saulzais-le-Potier, où j'ai vécu entre 1965 et 1969. Les derniers mots étaient ceux de Francis Jammes :
— Dis-moi, dis-moi, guérirai-je

de ce qui est dans mon cœur ?

— Ami, ami, la neige

ne guérit pas de sa blancheur.

Francis Jammes (Élégie septième)
Choisissant alors ces vers, je ne songeai encore pas du tout à la porcelaine ou à Moby Dick. Mais le motif était déjà dans le tapis.

Aucun commentaire: