Dans ces jours-là où il était en train de terminer sa dactylographie, ce qui s'imposait à lui c'était la même sensation délicieuse qu'on éprouve dans une convalescence, après une maladie douloureuse, lorsque le corps a décidé pour vous de vous laisser en paix et qu'il n'est plus sensible que par les signes de son effacement. Car il se sentait merveilleusement vide, et léger, soulagé - vide, c'est-à-dire de nouveau disponible par ce vide même attirant et appelant à lui ce qui viendrait l'emplir et le combler à nouveau. Ce qu'il se disait aussi, lorsqu'il cherchait à nommer ces impressions si proches de la convalescence par la puissance de leurs effets physiques, c'était que, changeant de registre, adoptant celui d'un administrateur de biens qui vous adresse son contrat de location, il venait de renouveler son bail avec la vie. Et Bastien lui avait téléphoné. (p. 13, c'est moi qui souligne)
Sans doute est-ce un même vide qu'évoque Nicolas Bouvier à la fin de L'usage du monde ? Dans lequel il voit paradoxalement notre moteur le plus sûr. J'ai retrouvé l'expression "cette espèce d'insuffisance centrale de l'âme" dans le petit texte de La guerre à huit ans : il en donne la source, ce qu'il n'a pas fait curieusement dans L'usage du monde, il s'agit d' Antonin Artaud, dont il salue la justesse cruelle.
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Aubrac - Haut-lieu du vide |
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