mercredi 13 août 2025

Cheminant dans l'impur et le bariolé

Je ne suis pas chez-moi cette semaine, et je n'ai que mon smartphone pour éventuellement écrire et publier un petit article. Je pourrais attendre bien sûr,  aucune urgence ne me requiert. Sans doute, mais l'envie est là, je le sens bien, de livrer quelques phrases au flux sans repos du net, des alluvions encore, comme cela en avait été projeté dès l'origine du blog, en 2006, presque vingt ans déjà. 

Des livres m'ont suivi jusqu'ici, à Bourges, où E., l'amie, expose depuis lundi à la galerie des Éphémères, avec deux autres artistes, FK et Pierrick Delobelle. Parmi ces livres, les Ecrits timides sur le visible, de Gilbert Lascault, que j'ai évoqué dans le billet précédent. J'en voudrais encore citer quelque passage :

"Cheminant dans l'impur et le bariolé, cette esthétique modeste doit se méfier des généralisations,  des grandes formules, des unifications.  Chacune de ses rencontres avec les oeuvres lui apparaît comme un événement particulier,  heureusement imprévisible,  comme un surgissement de sensations multiples et diversifiées. Sans trop se soucier des étymologies,  l'esthétique retrouve ici la sienne.  Elle est du côté des aisthéseis, du côté des sensations,  du côté des organes des sens, du côté de la peau et des plaisirs. Et toujours fidèle à cette étymologie,  elle ne prétend pas établir une coupure entre sensations, sentiments,  idées.  Tout est mêlé dans la rencontre : l'excitation,  l'amour,  le désir de savoir,  celui de toucher,  celui de maintenir une distance qui permet le regard. " (p. 13)

Voilà qui me touche au cœur, et à quoi je souscris totalement.  Et j'aime qu'un peu plus loin, en ce même texte, parlant de ces tableaux et de ces sculptures qui "peuvent nous aider à devenir moins raides, à nous éparpiller joyeusement ", il convoque, "pour nous apprendre la dispersion, l'errance souple", quelques oeuvres de celui que nous avons souvent croisé ces derniers temps, à savoir Bruegel.

"Dans la Chute d'Icare, le titre nous incite à une longue promenade à travers le tableau, avant d'apercevoir, minuscule, un peu à droite, en bas, les jambes nues de quelqu'un qui se noie, tandis que des bateaux, des paysans,  des moutons,  des oiseaux,  des rochers,  des édifices s'éparpillent en un monde apparemment indifférent à la catastrophe. Dans la Montée au Calvaire, la figuration du Christ écrasé sous sa croix, vêtu de gris, situé à une assez grande distance du premier plan, ne constitue qu'un des exemples ( l'un des plus discrets) de la violence disséminée dans la totalité de l'oeuvre." (p. 14-15)



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