Soif du poème
Appel de la crue
Appel au flot sombre des mots criblés d'ajours
A la boue bouleversant le mol balancé des rives
Au tourbillon tourbeux à la tombe certaine
Que monte la hargne des troncs la clameur des biefs
Qu'elle m'emporte en sa main noire d'aragne bègue
Qu'elle précipite les nuits sur le versant lissé des jours
Qu'elle ébouriffe les toits et ventile les ruelles
Soif du poème
Appel au débord au rut des vocables
Appel aux carex à l'alliance des granits
A la morve orpailleuse qui crie dans les caves
A la madone railleuse qui saigne son lait de sphaigne
Que s'élève le calice ruineux des cimes abattues
Que ploie sous la ténèbre le vol glacé des autours
Que tranchent dans le vif les remugles des douelles
Que se fracassent les refrains sans frein des amours
Soif du poème
Appel à la griffure
Appel à la brisure des écluses
A la nue sanglante de l'éternelle souillure
A la battue des quais chancelant sous les blasphèmes
Que crachent sur le ciel le fumier du nadir
Que s'encre une phrase aux chemins de misère
Qu'elle remue mes os et me scarifie de ses rythmes
Qu'elle m'enlise loin aux sentiers de la buse
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