«La gloire des yeux, c'est d'être les yeux de la colombe. »
Saint Grégoire de Nysse
Cette composition est très rare : on a suggéré qu'il s'agit d'une figuration des Rameaux. Cette fête chrétienne commémore l'entrée triomphale à Jérusalem de Jésus monté sur une ânesse, ses disciples l'accueillant avec des rameaux de palmier. « C'était une tradition orientale, déclare le Dictionnaire des Symboles (p. 800), d'acclamer les héros et les grands en brandissant des rameaux verts, qui symbolisent l'immortalité de leur gloire. »
Les Rameaux se célèbrent le dimanche qui précède Pâques, dont la date est fixée au premier dimanche suivant la pleine lune de l'équinoxe de printemps, donc entre le 21 mars et le 25 avril (35 jours que l'on appelle les journées pascales). Ce qui place la fête pratiquement toujours dans le signe du Bélier. On ne fait plus guère attention de nos jours à cette subordination du temps humain à la temporalité cosmique, à cette double détermination luni-solaire, pourtant nous continuons tous de fonctionner, croyants, laïcs et mécréants dans ce cadre multi-millénaire – et il n'est même aucun rationaliste farouche pour proposer de le modifier (la seule tentative en ce sens, celle du calendrier révolutionnaire, a fait long feu et personne ne s'aviserait aujourd'hui d'y faire retour).
Avec les Rameaux, c'est toujours la thématique du triomphe qui est exaltée, comme le souligne la prière de bénédiction des Rameaux :
« Bénissez, Seigneur, ces rameaux de palmier ou d'olivier, et donnez à votre peuple la parfaite piété qui achèvera en nos âmes les gestes corporels par lesquels nous vous honorons aujourd'hui. Accordez-nous la grâce de triompher de l'ennemi et d'aimer ardemment l’œuvre de salut qu'accomplit votre miséricorde. »
« La victoire célébrée ici, précise encore Le Dictionnaire des Symboles, est toute intérieure, c'est elle qui est remportée sur le péché, qui s'accomplit par l'amour et qui assure le salut éternel : c'est la victoire définitive et sans appel. Le symbolisme du rameau atteint à la plénitude de son sens.
Il était déjà préfiguré dans le rameau d'olivier que la colombe apporta dans son bec, pour annoncer la fin du déluge : La colombe revint vers Noé sur le soir et voici qu'elle avait dans son bec un rameau tout frais d'olivier. (Genèse, 8, 11). C'était un message de pardon, de paix recouvrée et de salut. Le rameau vert symbolisait la victoire de la vie et de l'amour. »
« Un rameau, dont la souple baguette et les feuilles d'or, se cache dans un arbre touffu, consacré à la Junon infernale. Tout un bosquet de bois le protège, et l'obscur vallon l'enveloppe de son ombre. Mais il est impossible de pénétrer sous les profondeurs de la terre avant d'avoir détaché de l'arbre la branche au feuillage d'or... Enée, guidé par deux colombes, se met à la recherche de l'arbre au rameau d'or dans les grands bois et soudain le découvre dans les gorges profondes. » (Eneide, chant VI, traduction d'André Bellessort )
Giuseppe Gambarini (Bologne, 1680 - 1720) Énée détachant le rameau d'or |
« Chacun d'entre nous, méditant sur le récit virgilien et en saisissant la signification universelle, rencontrera à son tour, dans l' « intermonde » de son propre itinéraire, les deux colombes et les suivra jusqu'à l'Arbre de Vie, pour se relier, lui aussi, au circuit des Énergies créatrices, et avancer sur la voie de la métamorphose. Car un symbole correctement compris dans sa multiple unité devient à jamais vivant pour celui qui l'a déchiffré, comme la substance même de son esprit et la source même de sa ferveur. » (Virgile, Maître de Sagesse, Archê, 1984, p. 224).
Villesalem - L'arbre de vie |
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