Extrait Cahier Clairefontaine bleu, A.R.n°4 |
J'avais récemment découvert Cité de verre, ce dont je n'ai pas de souvenir, mais j'écrivais dans le même cahier bleu, à la date du 10 février 1995 : "Ces dernières années, j'ai souvent lu des papiers sur Paul Auster et j'ai eu plusieurs fois la tentation d'acheter un de ses livres. Lundi, pour la première fois, j'ai franchi le pas. En me portant acquéreur du premier volume de sa trilogie new-yorkaise, Cité de Verre. [...] Toujours est-il que l'achat du Paul Auster me fut soudain nécessaire. Et le soir même je savais que l'impulsion à laquelle j'avais obéi ne venait pas au hasard ; couplage encore, avec un film cette fois, Rouge de Kieslowski, création elle-même fondée sur une trame serrée de correspondances."
Kieslowski...
Observez la boucle : d'une recherche sur Blois nous sommes parvenus à Tarkovski, et à un camion polonais rouge qui nous conduit par synchronicité à Kieslowski et sa Double vie de Véronique. Plusieurs échos se lèvent avec deux ouvrages de Sylvie Germain, sur Cracovie et le chemin de croix. Puis nous faisons retour sur Tarkovski à travers le thème du miroir commun aux deux cinéastes. Le livret du DVD du film Le Sacrifice comporte un texte de Pierre Legendre, qui nous renvoie alors à un premier entretien avec ce penseur, vingt-deux ans plus tôt, mis en miroir à l'époque avec un autre entretien avec Paul Auster. Lequel est lui-même couplé avec Kieslowski.
Une boucle spatio-temporelle, entre Europe et Amérique, et trois dates-clés, 1995, 2005 et 2017.
L'attracteur étrange se déploie sur trois décennies.
Le 10 février 1995, je poursuivais ainsi :
"Rouge s'ouvre sur un long travelling suivant une ligne téléphonique. Une plongée fulgurante dans un univers de câbles souterrains. Le téléphone, lien entre les êtres, support d'absence, ne cessera d'être présent dans le film.
De même, Cité de verre débute par ces lignes :
"C'est un faux numéro qui a tout déclenché, le téléphone sonnant trois fois au coeur de la nuit et la voix à l'autre bout demandant quelqu'un qu'il n'était pas. Bien plus tard, lorsqu'il pourrait réfléchir à ce qui lui était arrivé, il en conclurait que rien n'est réel, sauf le hasard."
J'avais entouré ce dernier mot : le hasard. Et nommé plus bas : Kieslowski, Le Hasard [titre de l'un de ses films] ; Auster, La musique du hasard [titre de l'un de ses livres].
J'avais noté aussi (15 février 1995) l'incipit du deuxième tome de la trilogie new-yorkaise, Les Revenants, très vite acheté après la lecture passionnée de Cité de verre.
"Tout d'abord il y a Bleu. Plus tard il y a Blanc, puis Noir, et avant le début il y a Brun. Brun l'a initié, lui a appris les ficelles et, lorsque Brun s'est fait vieux, Bleu lui a succédé. C'est ainsi que ça commence. Le lieu : New York ; le temps : le présent ; aucun des deux ne changera jamais."
Lisant ces lignes introductives, je songe seulement que la Trilogie new-yorkaise renvoie à la Trilogie de Kieslowski, Bleu-Blanc-Rouge... Le parallèle est séduisant. Sauf que Rouge est remplacé par Noir. Rouge qui est à l'origine de la présente dérive archéoréticulaire. Mais qui fait la une des journaux ces jours-ci ? Noir. Michel Noir. A Lyon.
André de Toth (USA) et Michel Noir (Maire de Lyon) - Cérémonie du centenaire du Cinéma - Lyon - 1995 © Anik COUBLE |
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