Les personnes sont inscrites dans des rectangles bleus, les œuvres apparaissent en violet, enfin les thèmes ou les motifs sont en vert. Les deux nœuds centraux, vers lesquels convergent le plus de lignes, sont William Blake et le silence.
La ligne rouge n'est autre que la dernière correspondance repérée, enregistrée ce soir-même.
Dans cette nébuleuse où les poètes ont la part belle, cette ligne relie deux d'entre eux, que je ne connaissais encore que de nom au début du mois. Ils portent tous les deux le même prénom de Jean-Paul (même si Auxeméry tend à le faire disparaître sur la couverture de ses livres). Ils me sont donc parvenus par deux canaux différents, et je ne soupçonnais rien d'une quelconque affiliation.
Or, assez vite, à les lire il m'apparut une certaine proximité dans la tonalité de l'écriture : une semblable pugnacité dans l'expression, dans la façon de se confronter au réel. Et puis il y avait cette esperluette, &, qu'Auxeméry emploie systématiquement à la place du "et", et que l'on retrouve dans le nom de la maison d'édition de Jean-Paul Michel, William Blake & Co.
Ceci n'était tout de même pas suffisant pour apparier les deux poètes.
Mais ce soir, en refeuilletant l'épais volume de Failles/traces - dont je n'ai lu, ce qui s'appelle vraiment lire quand il s'agit de poésie, que quelques pages -, à la recherche d'un mot qu'il m'avait semblé y avoir aperçu (et qui demeura invisible), je découvris, presque à la fin de l'ouvrage, un poème nommé Coda, qui était précisément dédié à Jean-Paul Michel (en musique, une coda (de l'italien « queue ») est le passage terminal d'une pièce ou d'un mouvement : la relation avec Jean-Paul Michel n'en était que plus cruciale).
Les premiers vers sont immédiatement dans cette veine âpre, combattante que j'évoquais à l'instant :
ta langue, ta langue,
garde ta langue
écorche, lape
lèche la cicatrice -
Veine qui ne se démentira pas, qui courra jusqu'au bout des trois pages du poème, où je fis aussi butin en passant d'un nouveau vertige :
l'or sous le groin, ce porc truffier :
cave, fouille, froisse
ce cerf à l'assaut des vignes, dans la nuit :
vendange
et ces rapaces, ces rapaces qui fondent,
coupent la course de leur proie :
viole l'air, ainsi, dépèce -
enfin tout le vertige de mots crus,
massacres, arguments de hache -
Cette rencontre montre bien l'intrication grandissante dans la nébuleuse.
Rue du 3ème RAC |
PS : Blogger transforme les belles esperluettes en & assez moches, désolé.
La vraie esperluette c'est ça (cf. Wikipedia) :
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