Cinq jours de pause atlantique. Sans aucune connexion. Et là, plus par volonté que par impossibilité technique : il est si simple aujourd'hui de trouver le réseau qu'il n'existe plus guère de zones véritablement blanches. Non, je voulais vraiment couper, ne plus avoir le souci de la publication, du suivi, des échos éventuels. Alors, pour respecter la grande contrainte que je me suis donné de publier chaque jour un article, plus que jamais j'avais pris de l'avance et programmé jusqu'à mercredi qui vient [ j'écris ce billet lundi 17 avril ] toute une série de chroniques.
Exit les longues plages de sable fin, les pins et les dunes, me voici revenu en Berry, n'ayant plus que deux jours d'avance avant de devoir travailler à flux tendu. Le problème ne réside pas dans les idées, les thèmes à traiter - ils se sont plutôt multipliés et j'ai bien en réserve une trentaine de synopsis de chroniques -, mais dans l'ordonnancement, la définition des priorités, le ou les chemins à baliser. Et sur ces points, c'est peu dire que je suis dans une grande incertitude.
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l'épave dans le sable de la plage (avril 2016), inaperçue cette année |
Les dernières chroniques ont beaucoup traité de géographie sacrée, en rapportant des observations déjà anciennes (zodiaque de Neuvy Saint-Sépulchre) et des découvertes récentes (Foy près de Gargilesse). Je voudrais maintenant élargir ce cadre avec un concept que j'ai déjà présenté ici (en 2007 pour la première fois, sans chercher à le définir), mais qui remontait en réalité à l'année 1991 : l'
Archéo-réseau. En 2012, en parlant de la
rêverie-fleuve chez
Victor Hugo, j'avais écrit
: "Archéo- voulant signifier un soubassement immémorial, un socle géosymbolique, mais non figé, toujours mouvant, actif, tectonique." Et je souscris toujours à cette tentative de description : l'Archéo-réseau rassemble toutes les cartographies mentales, imaginaires ou matérielles élaborées par les humains depuis l'avènement de Sapiens sur cette terre. Pour survivre, il lui a fallu prendre des repères, tisser des liens entre des lieux, marquer par des récits les histoires de chasse, mémoriser avec des signes et des mythes les événements et sites essentiels de son territoire. Il faut concevoir l'Archéo-réseau sur le modèle de l'internet, autrement dit non comme un unique et immense réseau mais comme un réseau de réseaux, où s'enchevêtrent de multiples systèmes symboliques, ramifiés comme les
dreaming lines des Aborigènes australiens ou centralisés comme les roues zodiacales grecques héritières des organisations symboliques des empires égyptiens et mésopotamiens.
Le plus complexe à saisir c'est la deuxième partie de la définition : "un socle géosymbolique
mais non figé, toujours mouvant, actif, tectonique." En effet, on peut s'accorder assez facilement sur le fait que l'homme a toujours eu besoin de structurer son espace de vie, d'y dessiner des frontières et d'y désigner des lieux plus importants que d'autres, que l'on nommera souvent
sacrés. Mais on jugera que ces structurations se succèdent en se détruisant ou en s'assimilant, et que seule l'archéologie, la recherche historique permettront de reconstituer leur genèse. L'idée de l'Archéo-réseau est plus folle : elle postule que quelque chose vit toujours de ces systèmes disparus. Et cela a à voir avec cet autre concept emprunté à la physique quantique : l'
intrication. De même que deux particules intriquées se comportent comme des entités uniques même si elles sont séparées par des centaines de kilomètres, les lignes de sens du jadis, intriquant plusieurs éléments que l’œil d'aujourd'hui voit comme des entités indépendantes, continuent à vibrer dans l'espace-temps contemporain. Et parfois, en les faisant revivre, on suscite un attracteur étrange qui va multiplier les coïncidences et faire entrer en collision l'actuel et l'ancestral.
J'ai bien conscience que ceci est difficile à penser et à accepter. C'est une intuition et non une démonstration. Demain, je prends un exemple.
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